Il y a deux ans, j’ai passé deux semaines de vacances en Pologne. Très joli pays, que j’ai eu le plaisir de découvrir au printemps (l’hiver y est assez rude, même en étant né au Québec).
Les séries télé
Quand je vais à l’étranger, j’aime bien zapper un peu à la télé, pour voir à quoi ressemble les émissions locales. Bon, cet exercice est évidemment plus intéressant quand on parle couramment la langue du pays, ou qu’on peut la comprendre en faisant quelques efforts. En l’occurrence, je n’ai aucune notion de polonais. Mais ça ne m’a pas empêché de tombé des nues.
La télévision polonaise diffuse des séries, comme toutes les chaînes télé de la planète. Et comme dans tous les pays, ils diffusent beaucoup de séries étrangères. Habituellement, quand on diffuse une série étrangère, il faut passer par une phase de traduction. Imaginez le faible succès qu’auraient eu en France des séries comme Les Experts, Dr House ou Desperate Housewives si elles avaient été intégralement diffusées en anglais…
Quoi qu’il en soit, quand il s’agit de traduire une série, vous avez 2 possibilités :
- Faire traduire les textes, embaucher des acteurs de doublage, leur faire enregistrer les voix dans la langue locale, et diffuser les épisodes avec ces voix. C’est la solution “grand-public” habituelle.
- Faire traduire les textes, et diffuser les épisodes en version originale avec des sous-titres écrits dans la langue locale. C’est la solution préférée des “puristes”.
La crise de rire
Ce qui est effrayant en Pologne, c’est que les chaînes de télé locales ont fait le plus mauvais choix possible quant à la méthode de traduction des séries qu’elles diffusent. Les séries ne sont pas doublées. Les séries ne sont pas sous-titrées. Non, quand on regarde une série étrangère, on entend (faiblement) les voix originales, puis (avec un léger décalage) une voix monocorde qui traduit en polonais ce qui vient d’être dit.
L’horreur absolue est atteinte quand on se rend compte que c’est la même voix qui traduit tous les acteurs. Si il y a une conversation avec des échanges rapides, je ne comprends pas comment les polonais réussissent à suivre (si ça se trouve, ils n’y arrivent pas).
Sérieusement, je n’étais pas enchanté à l’idée de regarder la télé dans une langue que je ne comprends pas du tout. Mais là, cette voix… elle réussit à rendre n’importe quelle série aussi vivante que l’oraison funèbre de Lénine.
Créer une chaîne de télé ?
À l’époque, je m’étais dit qu’il serait très facile pour une jeune chaîne de télévision de se différencier des autres en proposant des séries américaines sous-titrées. Je suis persuadé qu’en très peu de temps, une chaîne ultra-spécialisée sur ce créneau réussirait à récolter des parts d’audience très intéressantes. Et pourrait rapidement générer des profits, grâce aux recette publicitaires qui en découleraient.
Il n’est pas très compliqué de faire traduire les textes des séries, puis de synchroniser le texte avec la vidéo. Il suffit de voir tous les sous-titres qui sont créés par des passionnés avec peu de moyens (pour être utilisés avec les fichiers vidéos téléchargés illégalement sur Internet).
Par contre, créer une chaîne de diffusion télévisuelle, ce n’est pas simple. À vrai dire, je n’ai strictement aucune idée de par où commencer.
Alors ce qui me semblerait le plus facile, ce serait de commencer par créer une webtv, qui fasse du streaming de vidéo. Il faudra limiter la diffusion aux adresses IP du pays, car la négociation des droits de diffusion imposera de ne pas diffuser à travers le monde ; rien de très dur techniquement.
Une WebTV intéressante
Comment faire pour créer un site de diffusion qui se fasse connaître, sur lequel les internautes reviendraient régulièrement, et qui générerait du cash ?
Ça me semble tenir en quelques points :
- Une ergonomie très simple, pour aller droit à l’essentiel.
- De très courts spots publicitaires, diffusés au début et au milieu de chaque épisode. Je pense qu’il est possible d’être original et efficace sur ce point. Par exemple, un spot de 10 secondes est diffusé, puis la vidéo commence ; pendant que l’épisode avance, la publicité peut rester affichée à côté de la vidéo, tant qu’elle n’agresse pas le spectateur.
- Ne pas proposer un seul flux de streaming, mais deux ou trois. Avec par exemple un flux qui va diffuser des séries d’action, un autre des séries humoristiques, une autre des soap-opera, … Il faut prévoir les serveurs et la bande passante en conséquence, mais ça vaut la peine.
- Il faut être irréprochable sur le guide des programmes. Les utilisateurs doivent pouvoir retrouver très facilement la date et l’heure à laquelle leur série préférée va être diffusée. Ça veut dire qu’il faut proposer une grille classique des programmes ; mais il faut la rendre multi-supports (site mobile, SVI) et idéalement proposer des alertes email et SMS pour prévenir lorsqu’une série correspondant aux goût de quelqu’un va être diffusée ou rediffusée.
La négociation des droits de diffusion est un sujet auquel je ne connais absolument rien. J’imagine qu’en prenant un peu de temps et en faisant preuve d’audace, il doit être possible de joindre les chaînes américaines qui produisent ces contenus.
À mon avis, il doit être possible de créer un service qui trouvera son public, même sans diffuser les toutes dernières séries. Je me souviens qu’il y a une petite dizaine d’années, il y avait eu une manifestation au pied de la principale chaîne télévisée moscovite, parce qu’ils avaient arrêté de diffuser Dallas !
La vitesse supérieure
Si on laisse vagabonder notre imagination, on peut rêver à la manière dont ce service pourrait évoluer s’il rencontre le succès.
Ce que j’imaginerais bien, c’est de commercialiser une boîtier, qui serait connecté au modem ADSL d’un côté et à la télé de l’autre, qui servirait uniquement à diffuser les chaînes proposées par le service. En allant voir un fabricant dont c’est la spécialité, comme Netgem ou Sagem (ou un constructeur chinois ?), il devrait être possible de créer un boîtier de ce genre, là encore le plus simple possible.
3 fonctionnalités :
- Afficher la liste des chaînes disponibles.
- Choisir une « chaîne » pour regarder les séries qui y sont diffusées.
- Voir le guide des programmes.
Avec aussi peu de fonctionnalités, on peut espérer pouvoir utiliser une plate-forme technique toute faite, pour réduire les frais de R&D.
Ce genre de boîtier a fleuri en France avec le passage à la télévision numérique, avec des offres comme TnTop ou TV Numeric. Enfin, ce n’est pas du tout comparable d’un point de vue technique. Mais fonctionnellement et commercialement, c’est assez similaire.
L’idée est de faire payer un (faible) abonnement mensuel, en échange d’un service amélioré : visualisation sur la télévision (au lieu d’un écran d’ordinateur) et suppression des publicités.
Pour garder le service le plus simple possible, je pense qu’on peut rester sur une diffusion en streaming classique, avec des chaîne thématiques. Il n’en reste pas moins que la VOD (télévision à la demande) pourrait être une évolution possible du service, en restant sur de la diffusion de séries sous-titrées ; mais la complexité technique serait alors bien plus grande.
une version 2011 de CanalWeb ?
Pas tout à fait. CanalWeb produisait du contenu, ce qui a un coût en matériel, en locaux, en personnel, et temps. Je suggère une méthode bien plus rapide − bien que sûrement assez coûteuse aussi − et surtout bien plus simple au niveau de la logistique : acheter du contenu auprès des producteurs américains.
D’un point de vue marketing, il est aussi plus facile d’expliquer (et donc de vendre) un truc du genre :
«Une chaîne qui diffuse les séries que tu aimes, sous-titrées au lieu d’être doublée de la manière la plus désagréable qui soit.»
Plutôt que :
«C’est une chaîne sur le web, qui diffuse des contenus super-géniaux. Si, si, je te jure, il faut que tu viennes voir ça, il y a des émissions vachement bien. Bon, là j’ai plus leurs noms en tête, ni leurs horaires de diffusion, mais c’est top !»
En plus, je pense que l’équipement informatique et les connexions réseau n’étaient pas adaptés à l’époque de CanalWeb. Alors que maintenant c’est bien mieux, même en Pologne.
Le concept existe déjà au US et canada notamment avec netflix.com .
En france je suis pas convaincu du succès d’un tel services , tout simplement parce que le public qui souhaite voire du contenu en VO / VOST est très minoritaire.
Faut pas oublier que le français moyen est réfractaire à tout ce qui n’est pas en français. Perso je préfère regarder un film en VO même si j’en chie un peu sans sous titre que de subir une VF minable, mais dans mon entourage je suis un des seuls et pourtant je suis cerné par un bon paquet de geek qui à priori on quelques notions d’anglais.
Les grandes chaines tatent le terrain depuis quelques année avec leur VOD de séries tv US diffusées le lendemain, mais j’ai pas l’impression que ça décolle , surement à cause du prix (un épide à 2€ sa calme vite) et encore une fois de la cible restreinte.
PAr contre j’adhère complètement à l’idée de la pub ultra courte. C’est un peu le concept américain d’ailleurs. Pendant un match de baseball (je prend ca comme exemple c’est ce que je regarde le plus en live ^^ ) on se bourre peut être 10 ou 15 coupures pub mais très courtes et intelligement placée , du coup ca passe autrement mieux que les 3*6min de Wiskas et Cételem qu’on se tape chez nous …
@Grunk : Netflix fait de la VOD, ce n’est pas tout à fait ce que je propose.
Pour le reste, le concept expliqué ici ne fonctionnerait pas en France. Mais je reste persuadé qu’en Pologne (et dans les autres pays d’Europe de l’est qui utilisent la même méthode de traduction), il y a un vrai potentiel à la diffusion de séries sous-titrées.
pour la Pologne, j’y étais allé en 1992, c’était déjà de la traduction simultanée en léger décalé avec la même voix pour Jason et la petite fille apeurée :). Tradition quand tu nous tiens !
Sympa ton blog, bravo !
Les articles sur les idées d’enteprise devraient avoir le même tag, non ?
le manque d’ouverture d’esprit est vraiment risible. Ah, le nombril français est abyssal je vois.
Ce n’est pas parce que dans votre pays on double d’une manière que c’est la meilleure au monde. En Pologne, on double vraiment, c’est à dire qu’on ne joue ni n’interprète pas le jeu des acteurs, et quand on a les capacités cognitives de faire le distinguo entre les dialogues en anglais et le doubleur cela n’a rien de Risible ni d’aussi catastrophique que vous semblez l’écrire. Cette petite mécanique du cerveau , très vite assimilable à qui en a les capacités, fait immédiatement oublier le doubleur qui devient juste un médium émettant une info. Pour le reste, vous avez sans doute un problème auditif et c’est dommage, les dialogues en anglais sont largement audibles et le public polonais a la chance d’entendre les vraies voix des acteurs et de suivre le film dans sa langue originale. (Et de faire des progrès en anglais très vite quand on est étudiant!).
Le ton monocorde est justement choisi pour s’effacer au profit du jeu des acteurs . L’allusion à l’oraison funèbre de Lénine… Très original et surtout très sarcastique. Bref, vous qui dites voyager…monsieur le globe trotteur vous passez la pour un bon gros benet. A bon entendeur. Salut.
@Kamikaznavour : Chacun son opinion, hein. Moi je reste persuadé que le mieux reste l’approche des pays scandinaves, qui ne font pas de doublage mais ajoutent simplement des sous-titres.
Après, dire que la voix monocorde utilisée pour doubler tous les acteurs est mieux que les autres solutions, et que «en Pologne, on double vraiment»…. Let’s agree to disagree !