J’ai souvent parlé du comportement en entreprise, en insistant sur l’aspect humain que doivent avoir les relations professionnelles. L’empathie – la capacité de comprendre les gens – et la politesse – se mettre à la place des autres – sont des qualités plus qu’appréciables dans la vie de tous les jours, mais aussi au travail. L’ère des chefs d’entreprise-dictateurs est révolue. Le meilleur moyen de faire travailler une équipe est de faire en sorte que ses membres se sentent bien et apprécient de travailler en commun.
Toutefois, il existe un cas (un seul !) où l’on peut sortir de ses gonds. C’est quand on a en face de soi une personne qui, justement, n’en a rien à faire des autres. C’est un comportement détestable, qui pourtant se rencontre de temps en temps.
Commençons par analyser le cas. De manière générale, les gens sont relativement civilisés et polis. Parfois, certaines discussions peuvent s’envenimer un peu, mais les choses restent globalement à un niveau acceptable. Mais certaines personnes utilisent cet état de fait, la plupart du temps de manière inconsciente, pour s’affirmer par la force ; ces personnes savent pertinemment qu’elles prennent peu de risques à se montrer odieuses.
Prenez par exemple ceux qui mettent de la musique à fond dans les transports en commun. Ils gênent à eux seuls plusieurs dizaines de personnes, mais ils s’en moquent. Consciemment, ils se disent juste « Je fais ce que je veux » ; mais surtout, leur subconscient leur susurre « C’est bon, tu peux y aller, de toute façon personne ne va oser bouger le petit doigt ! ». Et finalement, c’est bien ce qui arrive ; tout le monde se laisse emmerder, se disant qu’il vaut mieux supporter ça 15 minutes que de chercher le conflit.
Autre exemple : Un enfant chahuteur ira chercher la bagarre avec les plus petits que lui, parce qu’il sait qu’ils ne répliqueront pas.
Dans le monde de l’entreprise, c’est pareil.
Ça peut prendre la forme d’un employé, qui hausse le ton dès qu’on ne va pas dans le sens de ses idées. Ce faisant, il y a de grandes chances que ses collègues et supérieurs finissent par lui laisser plus de libertés qu’ils ne le voudraient, pour ne pas systématiquement partir dans des prises de tête chronophages.
Inversement, ce phénomène concerne aussi certains managers, qui pensent qu’ils ont le droit d’engueuler leurs subordonnés. Ils pensent même – inconsciemment, toujours – que cela renforce le message qu’ils cherchent à faire passer.
Bien souvent, on a tendance à penser « OK, c’est sa manière de fonctionner. Je ne vais pas y faire attention, je vais laisser glisser ». Parce que cette personne n’est pas diplomate, on essaye de l’être à sa place. Mais il y a 2 arguments contre cela :
- Si la diplomatie est importante au travail, c’est qu’il y a de bonnes raisons. Laisser quelqu’un se comporter désagréablement avec les autres, c’est prendre le risque de « perdre » d’autres personnes qui supporteraient la situation plus mal que vous.
- Si vous observez finement ces personnes, vous remarquerez qu’elles ne se comportent pas de cette manière avec tout le monde. Elles développent un 6ème sens, qui leur indique quand elles peuvent se le permettre. Lorsqu’elles sont face à une autre personne « comme elles », le ton reste toujours cordial.
La solution : Faire comprendre que si le mauvais comportement ne cesse pas, les conséquences pourraient être inattendues.
Mon expérience
J’ai eu un supérieur hiérarchique qui n’hésitait pas à se mettre en colère. C’était plus fort que lui, quand le travail de quelqu’un ne correspondait pas à ce qu’il avait en tête, il montait très vite dans les tours. Autant dire que tout le monde en prenait pour son grade régulièrement.
Je me disais fréquemment qu’il faudrait un jour lui faire comprendre à quel point ce comportement était désagréable. Mais mon tempérament fait que je cherche à comprendre les gens, à arrondir les angles, à convaincre et obtenir le consensus par des arguments factuels… pas à m’énerver parce que la personne en face de moi dépasse les bornes.
Et un jour où j’étais particulièrement fatigué physiquement et nerveusement, nous avons été plusieurs à nous prendre encore une engueulade collective lors d’une réunion. C’était injustifié sur le fond et insultant sur la forme. La fatigue aidant, je suis parti « en live » aussitôt, m’énervant comme jamais je ne l’avais fait ; j’ai élevé la voix, j’ai réfuté en bloc tous les arguments, je suis allé jusqu’à taper sur la table…
Résultat, il s’est calmé aussitôt. La suite de la réunion a été très cordiale. Il a compris que je ne me laisserai plus marcher sur les pieds, que je ne lui servirai plus de punching-ball.
Et les fois suivantes où son tempérament sanguin le poussait à s’énerver, son cerveau lui rappelait que finalement il n’avait peut-être pas intérêt à continuer dans cette voie-là.
Conclusion
Je n’incite personne à s’énerver pour se faire entendre. La diplomatie est bien plus efficace.
Mais quand la personne en face de vous n’hésite pas à le faire, de manière répétée, il est important de montrer que vous avez une limite et qu’elle a été dépassée. Et la plupart du temps, ces personnes ne le comprennent pas quand on leur explique simplement ; elles ne s’en souviennent que si on leur réplique.
Attention à ne pas en faire un défouloir. Ce n’est pas le but.
Merci pour ce témoignage et ces conseils.
Je suis souvent amenée à travailler en équipe. Et jai beaucoup de mal à trouver ma place, parce que je suis gentille ( ça naide pas) et de surcroît timide !
Mais l’article est très vrai. J’avais déjà fait un cette analyse merci encore.
Bonjour .pareil que Sandrine, j ai tendance a être réservée et gênée si on dit quelque chose sur moi ,je n ai pas la replique facile …Or là je me retrouve avec une personne en face de moi qui se permet des choses que jamais je n oserai faire et qui devient impolie …et j ai tendance assez souvent à dire que ce n est pas grave…du coup assez souvent je me donne la réflexion pour le prendre a froid …mais là, j en ai marre …ce sont toujours les petits et petites jeunes qui dépassent les bornes ….aujourd’hui je vais lui dire ce que j en pense …
@Julie : Si un supérieur hiérarchique peut gérer la situation − surtout avec des « petits et petites jeunes » − ce sera toujours mieux que de le gérer vous-même. Lorsqu’il faut recadrer quelqu’un, ça a toujours plus de poids lorsque ça vient de quelqu’un qui décidera des augmentations à la fin de l’année…
Maintenant, si c’est de l’ordre des échanges personnels (dans un cadre professionnel), il faut effectivement montrer où sont les limites. C’est vrai que ce n’est pas forcément évident d’avoir la bonne répartie sur le moment. Il ne faut pas hésiter à prendre la personne entre quatre yeux plus tard (mais pas trop longtemps après, sinon ça ne sert plus à rien), pour lui dire qu’elle ne peut pas se comporter comme cela, et que si elle continue ça finira par la desservir professionnellement.