La plupart des entreprises font une évaluation annuelle ou biannuelle de tous leurs collaborateurs. C’est un moment important, pendant lequel l’employé et son supérieur hiérarchique font le bilan du travail effectué, redéfinissent la mission et les résultats attendus. C’est souvent le bon moment pour parler ouvertement de ce qui va et ne va pas au niveau de l’entreprise, des méthodes de travail, des relations professionnelles, etc.
Pour un manager
Vous devez faire passer les entretiens d’évaluation des membres de votre équipe. Ils attendent ce moment, peut-être avec plus d’impatience que vous ne pensez, car ils y voient – à juste titre – un moment privilégié pour partager avec vous leurs problèmes et leurs doutes.
Prenez le temps de préparer convenablement chaque entretien. Si vous n’avez vraiment pas de temps à y consacrer, essayez plutôt d’organiser des discussions plus informelles autour d’un café ; vous pouvez même le faire dans un bar ou un restaurant, pour sortir du cadre de l’entreprise ; ce genre de discussion peut se révéler presque aussi productif qu’un entretien carré.
Il est assez classique d’utiliser 2 indicateurs pour évaluer les personnes : le Skill et le Will. Ces deux barbarismes sont assez simples à comprendre :
- Skill : les connaissances, les capacités, ce que sait faire le collaborateur.
- Will : la volonté, l’implication du collaborateur, ainsi que son ambition.
On considère habituellement 4 cas de figure :
- Skill et Will bas : Il faut se demander s’il faut garder le collaborateur.
- Skill et Will élevés : C’est la fête, il faut lui confier plus de responsabilités et augmenter son salaire.
- Skill élevé et Will bas : La personne est compétente mais elle s’ennuie. Soit vous trouvez le moyen de la remotiver, soit c’est la voie de garage assurée.
- Skill bas et Will élevé : Investissez le temps nécessaire pour le former correctement, car si sa motivation reste intacte, il pourra atteindre des sommets.
Personnellement, je préfère utiliser deux autres baromètres, pour situer les connaissances techniques d’un côté (assez similaire au Skill) et le comportement en entreprise de l’autre. Ce second point est différent du Will, dans le sens où il ne sert pas uniquement à mesurer la volonté et l’ambition du collaborateur, mais aussi comment il interagit avec ses collègues, comment il accepte de travailler en équipe, à quel point il est capable de réfléchir au bien de l’entreprise en premier.
Ces deux indicateurs sont particulièrement utiles avec les juniors et les stagiaires, qui ont souvent une expérience limitée du travail en entreprise. Il est alors parfois utile de mettre l’accent sur leurs comportements. Un jeune qui a un bon comportement, qui accepte d’écouter ce qu’on lui dit et qui a envie d’apprendre, réussira toujours à s’en sortir.
Timing et déroulement
Certaines entreprises effectuent leurs entretiens à la date anniversaire de l’entrée du collaborateur dans la compagnie. D’autres effectuent tous les entretiens en même temps, en décembre-janvier et/ou en juin-juillet. L’une ou l’autre formule peut être utilisée sans que cela ne change grand-chose. Par contre, pour les nouveaux embauchés (ou les stagiaires), je conseille d’y ajouter trois entretiens supplémentaires à la fin du premier mois, du troisième mois et du sixième mois ; cela permet de suivre l’intégration du nouvel élément au fil du temps.
Dans tous les cas, voici comment je procède :
- Envoyer aux employés un formulaire, dans lequel ils vont pouvoir noter les difficultés qu’ils ont rencontrées dans l’accomplissement de leur mission, et comment ils voient leur évolution sur l’année à venir.
- Préparer les évaluations. Chacune d’entre-elles se découpe en 3 parties :
- Un résumé global, qui reprend l’évolution du collaborateur pendant l’année écoulée. Le but est ici de donner la « big picture », l’impression générale de progression.
- Une grille qui reprend les différents projets sur lesquels il est intervenu, avec une note (de faible à excellent). Là on resserre sur le plus important, la manière dont il s’est acquitté concrètement du travail qui lui était affecté.
- Une grille très précise, qui donne une note pour chaque aspect de son travail. Cela va des points techniques (développement, environnement Unix, …) jusqu’au comportement en entreprise (esprit d’équipe, force de proposition, intérêt pour notre business, …). Cette liste aidera à son développement personnel.
- Pendant l’entretien, on commence par reprendre la précédente évaluation s’il y a lieu. Puis on va lire le formulaire rempli par l’employé, et on en discute les points qui y sont listés. Ensuite, on passe en revue l’évaluation que j’ai faite. La discussion qui s’ensuit permet de confronter les points de vue, et éventuellement de modifier les remarques et notes portées sur l’évaluation.
- Après l’entretien, une version à jour de l’évaluation est remise à l’employé.
Et après ?
Une évaluation n’est pas une simple photographie du niveau d’un collaborateur à un moment donné. C’est un outil qui doit servir à encadrer au mieux la personne, pour lui permettre de progresser tout au long de l’année. Elle doit donc contenir deux groupes d’objectifs : ceux que l’employé doit atteindre par lui-même (en bénéficiant de votre support et de votre aide le cas échéant) ; et ceux que se fixe l’organisation de l’entreprise suite à l’entretien d’évaluation, et qui sont nécessaires au plein développement du collaborateur.
Ce second point n’est pas naturel. Trop d’entreprises fonctionnent avec des évaluations qui ne vont que dans un seul sens. Pourtant, il est important de comprendre que l’organisation n’est pas une chose qui se grave dans le marbre ; elle doit être faite par et pour les membres qui composent votre équipe. Si vos collaborateurs soulignent des manquements dans vos process ou dans les méthodes utilisées, saisissez cette opportunité d’améliorer les choses. Profitez-en pour intégrer vos employés aux réformes qui sont peut-être nécessaires : ils doivent en faire partie, et non pas les subir.
Enfin, certaines entreprises pratiquent la notation des cadres. Ce n’est pas toujours très évident à mettre en place, particulièrement dans les pays « latins », où ce genre de chose peut se transformer en règlement de compte – particulièrement si cette notation est anonyme.
Par contre, tous vos entretiens doivent comporter un moment où vous mettez à l’aise votre collaborateur, et lui demandez de vous dire simplement ce qu’il pense de l’organisation générale de l’entreprise, de la manière dont les projets sont gérés, de la manière dont vous gérez votre équipe. Demandez-lui s’il a des suggestions à faire, et voyez là-aussi une opportunité de progresser.
Un petit commentaire complémentaire.
Dans beaucoup d’entreprises, les managers sont habitués (et même parfois formés) à trouver les arguments qui permettront une faible (au nulle) augmentation de salaire.
Mis à part le cas où le collaborateur à excellé et largement dépassé ses objectifs.
Bref, le manager a toujours les arguments qu’il faut pour expliquer une augmentation plus faible que ce qu’on attend.
Au collaborateur de préparer également cet entretient. Il faut savoir mettre en avant tout ce qui peut faire valoir. Toutes les actions ou initiatives que l’on a pu prendre et qui peuvent justifier une reconnaissance particulière de l’employeur.
On a tendance à croire que le directeur connaît chacun de ses collaborateurs et saura les évaluer et les récompenser justement. C’est vrai dans une petite structure. Ça l’est beaucoup moins dans une grosse.
Il faut donc savoir se vendre.
C’est du vécu. Pendant des années je me suis démené pour faire au mieux ce qu’on me demandais et en faire plus. Dès que j’en avais l’occasion, j’apportais un plus sur les projets auxquels je participais.
J’ai toujours été déçus de la reconnaissance que la direction m’apportait.
Je me suis rendu compte un jour que j’étais trop discret et que cette direction ne me connaissait pas bien.
Bref, en plus de faire du bon travail, il faut savoir le dire !
Oui, c’est un bon point. J’ai abordé ici la partie « intéressante » de l’évaluation annuelle, principalement d’après le point de vue du manager. Je comptais garder le sujet des négociations salariales pour un autre billet, car il s’agit d’une chose importante et préoccupante.
Pour le moment, je me contenterais de confirmer : il est vital de communiquer efficacement sur la valeur de notre travail. Même en dehors du contexte de l’entretien et de l’augmentation, faire un bon boulot et que ça ne se sache pas, cela revient quasiment au même que de ne rien faire.
J’ai fini par redécouper cet article, pour le centrer uniquement sur le point de vue des managers. Je vais bientôt en écrire un autre, qui présentera la vision inverse.
Je suis totalement d’accord. Pour moi c’est un des piliers du travail en entreprise. J’ai longtemps cru qu’il fallait uniquement travailler le mieux que l’on peut. Mais la communication est primordiale, en tout cas si ton objectif est d’évoluer. Tu peux bien (ou mal d’ailleurs) faire ton boulot: si personne ne s’en rend compte, ca ne sers pas à grand chose.